portrait amusant d'une jeune femme tirant la langue comme un enfant

La persistance de réflexes archaïques est un défi pour le dentiste-occlusodontiste comme pour l’ensemble des professionnels de santé. Un défi diagnostic et clinique car leur rémanence ou leur résurgence peut être un facteur de troubles fonctionnels -et de douleurs chroniques- notamment dans la zone oro-faciale. Mais il est aussi important de les repérer lorsqu’ils participent aux troubles posturaux et comportementaux. Une orientation spécifique, au sein d’une équipe transdisciplinaire, permet  de faciliter leur intégration.

Pour rappel : les réflexes archaïques sont des réponses motrices automatiques et involontaires présentes chez le nouveau-né. Ces réflexes jouent un rôle indispensable dans le développement de l’enfant. Certains réflexes primitifs ont vocation à évoluer au cours de la première année de vie. Ils sont normalement intégrés ou inhibés (Goddard Blythe, 2009, p. 24). Cependant, leur persistance (ou leur résurgence) au-delà de cette période peut avoir des répercussions significatives sur la santé et le développement d’une personne. 

Réflexes archaïques et développement maxillo-facial

Le réflexe de succion est sans doute le plus connu des dentistes, occlusodontiste et orthodontiste. Ce réflexe archaïque est souvent impliqué dans les troubles de l’occlusion et les dysfonctions oro-faciales. Konicarova et Bob (2013), ont montré que la persistance de certains réflexes primitifs peut affecter le développement de la région maxillo-faciale, et par là compliquant l’équilibration de l’occlusion dentaire. 

Les cliniciens observent également que la persistance d’une déglutition “atypique” ou “infantile” est un facteur aggravant dans les douleurs au niveau cervical. La prise en compte de ces réflexes est indispensable dans la stratégie des traitements orthodontiques et/ou traitements occlusaux. Si les exercices proposés aux personnes qui consultent ne suffisent pas, il est sans doute utile de les orienter vers une éducation thérapeutique spécifique. (C’est pourquoi je vous recommande la conférence-soirée rencontres avec notre consœur Héloise Felter, docteur en chirurgie dentaire, orthodontiste et qui s’est formée aux méthodes innovantes d’intégration des réflexes archaïques… et qui en a fait sa nouvelle activité ! Cliquer ici pour plus d’info

Plus largement, la persistance des réflexes archaïques peut avoir une influence délétère globale.  Cette question intéresse donc tous les professionnels de santé. Voici quelques exemples :

En ce qui concerne la posture et les tensions musculo-squelettiques : des réflexes non intégrés peuvent perturber l’activation normale des muscles du tronc, contribuant ainsi à des déséquilibres posturaux et à des douleurs chroniques. Les réflexes archaïques persistants peuvent être associés à divers troubles du développement. Melillo (2016, pp. 1075-1095) souligne l’importance de distinguer ces réflexes persistants d’autres troubles neurologiques. La persistance des réflexes archaïques au-delà de leur période normale d’intégration peut se manifester par divers signes et symptômes. Gieysztor et al. (2018) ont mis en évidence que cette persistance est associée à des problèmes moteurs chez les enfants d’âge préscolaire. McPhillips et Jordan-Black (2007) ont pointé les réflexes archaïques dans les difficultés d’apprentissage et de concentration, dans leur étude sur les enfants dyslexiques.

L’étude et la prise en charge des réflexes archaïques représentent un champ d’exploration prometteur. Une approche globale du patient prenant en compte ces réflexes, peut donc offrir de nouvelles perspectives thérapeutiques pour de nombreux troubles et douleurs chroniques, qui résistent à nos soins. Avec des bénéfices pour la santé globale de nos patients. Si l’étiologie de cette non-intégration est multifactorielle, la corrélation des troubles qu’ils génèrent nous engage à un accompagnement transdisciplinaire.

Des références bibliographiques  pour aller plus loin

Goddard Blythe, S. (2009). Attention, balance and coordination: The A.B.C. of learning success. John Wiley & Sons. (p. 24)

Parfrey, K., Gibbons, S. G., Drinkwater, E. J., & Behm, D. G. (2014). Effect of head and limb orientation on trunk muscle activation during abdominal hollowing in chronic low back pain. BMC Musculoskeletal Disorders, 15(1), 52.

Konicarova, J., & Bob, P. (2013). Principle of dissolution and primitive reflexes in ADHD. Activitas Nervosa Superior, 55(1-2), 74-78.

Melillo, R. (2016). Persistent primitive reflexes and childhood neurobehavioral disorders. In V.B. Patel, V.R. Preedy, & C.R. Martin (Eds.), Comprehensive guide to autism (pp. 1075-1095). Springer.

Gieysztor, E. Z., Choińska, A. M., & Paprocka-Borowicz, M. (2018). Persistence of primitive reflexes and associated motor problems in healthy preschool children. Archives of Medical Science: AMS, 14(1), 167-173.

McPhillips, M., & Jordan-Black, J. A. (2007). Primary reflex persistence in children with reading difficulties (dyslexia): A cross-sectional study. Neuropsychologia, 45(4), 748-754./