Les Thérapies Cognitivo-Comportementales (TCC) ont-elles leur place au cabinet dentaire ? Certainement, répondent les auteurs d’une étude brésilienne, notamment pour le contrôle du bruxisme et le soulagement des Dysfonctions Temporo-Mandibulaires. Ces troubles sont fréquemment associés et ont longtemps été abordés sous un angle mécanique. Or un article* publié dans les « Annals of Dentistry and Oral Health » (Annales de dentisterie et de santé bucco-dentaire) souligne l’intérêt de proposer, au cabinet dentaire, une approche basée sur les principes des Thérapies Cognitivo-Comportementales (TCC). Ces techniques visent à transformer les comportements, en renfort de l’éducation thérapeutique et de la rééducation. Les auteurs, Ricardo Luiz de Barreto Aranha et Daniela Aguiar Franzen, présentent les éléments clés de cette méthodologie. Elle élargit utilement la palette de traitement du bruxisme et des DTM, par une approche non invasive et à moindre frais.
Compréhension des Troubles Temporo-Mandibulaires et du Bruxisme
Les traitements des troubles touchant les articulations temporo-mandibulaires et les muscles de la mâchoire, ont évolué vers une prise en charge des facteurs « biopsychosociaux ». Le bruxisme, défini comme une activité musculaire répétitive de la mâchoire, est désormais considéré comme un comportement plutôt que comme une pathologie. Un comportement problématique par son intensité et sa fréquence. L’article explore les catégories de bruxisme, notamment le bruxisme du sommeil et le bruxisme d’éveil. Les auteurs souligne le rôle prépondérant de ce dernier dans les DTM.
Extrait (traduction dentistes-occlusodontistes.fr) :
Le behaviorisme introduit par John B. Watson en 1913 et développé grâce aux études de B.F. Skinner (1904-1990), « repose sur le fait que différentes actions (comportements) humains sont apprises, détectables, renforcées ou éteintes dans certaines conditions. Une « technologie comportementale » a été développée pour modifier ces actions, largement basée sur des expérimentations animales.
La branche cognitive (cognition = connaissance/apprentissage) suppose que la pensée influence les sentiments. L’esprit intervient entre un événement et sa réponse. Ainsi, en théorie, il est possible d’amener le patient à avoir des pensées plus positives et à ne pas se concentrer sur des interprétations négatives de la réalité, comme c’est le cas par exemple dans la dépression. George Kelly (1905-1967) et Aaron Beck comptent parmi les auteurs représentant cette technique.
Des interventions cognitivo-comportementales (brève) sont utilisées depuis les années 1960 pour soulager les troubles douloureux, y compris les DTM. Selon Hathaway (1997) et Dworkin (2000), ces stratégies doivent être accessibles au clinicien qui souhaite traiter les DTM ou contrôler le bruxisme, y compris les méthodes permettant de faire face à la douleur ou au dysfonctionnement et [qui permettent] de réduire les habitudes inappropriées pour la zone orofaciale et pour la santé en général (sédentarité, malnutrition, habitudes de sommeil inadéquates…). Ainsi que des approches [facilitant] le contrôle du stress (tels que l’hypnose et la relaxation). »
Approche Cognitivo-Comportementale : Un Changement de Paradigme
Les dentistes, que les auteurs nomment « cliniciens biocomportementaux », peuvent tirer partie des approches cognitivo-comportementales pour traiter l’anxiété et les conséquences dentaires. L’article met en avant l’idée que le processus de pensée joue un rôle central dans la perception de la douleur et des troubles orofaciaux, soulignant l’importance de comprendre les comportements observables chez les patients.
Application pratique des Stratégies Cognitivo-Comportementales
Quelles sont les applications dans la pratique clinique ? L’article insiste sur l’importance de questionner les habitudes bucco-dentaires et les habitudes de vie, y compris le bruxisme, lors de l’examen initial. Il est crucial de proposer des recommandations claires au patient, dans des termes en adéquation avec sa condition socioculturelle. L’article souligne également l’importance de sensibiliser les patients à la position de repos mandibulaire et présente des techniques de formation et de transformation des comportements.
Engagement du patient et nécessité d’une approche multidisciplinaire
Pour contrôler efficacement les TMD et le bruxisme, l’article souligne l’importance de l’engagement du patient dans les stratégies cognitivo-comportementales. Le diagnostic doit être précis. Si nécessaire, le praticien pourra également orienter vers une psychothérapie de soutien. Car cela peut être nécessaire pour traiter les aspects émotionnels sous-jacents. Enfin, l’article encourage une approche multidisciplinaire pour des résultats optimum impliquant aux côtés du dentiste, des professionnels de santé mentale.
Références et Perspectives Futures
L’incorporation des stratégies cognitivo-comportementales dans le répertoire thérapeutique des dentistes est justifiée par les études (voir la longue bibliographie de l’article). Car même si le niveau d’évidence est variable selos les études, des résultats positifs sont rapportés. Alors que les coûts financiers de ces approches sont négligeables pour des bénéfices qui dépassent la simple réduction des troubles orofaciaux. Les auteurs en concluent que ces approches peuvent être des options valables de traitement ou de contrôle des parafonctions. Ils appellent donc à une recherche continue pour consolider les connaissances dans ce domaine en évolution constante.
*Références : Aranha Ricardo (1), Franzen Daniela (2), 2021/07/12. Cognitive -Behavioral Strategies for Controlling Temporomandibular Disorders and Bruxism: A Brief Review, MedDocs Publishers égamement disponible sur Researchgate
(1) Ricardo Luiz de Barreto Aranha, Dentiste expert en douleur orofaciale et orthodontie, Programme d’études supérieures en médecine dentaire, Faculté de médecine dentaire, Université fédérale du Minas Gerais, Belo Horizonte, Minas Gerais, Brésil.
(2) Daniela Aguiar Franzen, Psychologue diplômée de l’Université fédérale du Paraná, Curitiba, Paraná, Brésil, Dentiste diplômé de l’Université pontificale catholique du Rio Grande do Sul, Porto Alegre, Rio Grande do Sul, Brésil.